Saturday, 21 September 2013

Jimmy P, psychothérapie d'un indien des plaines


ENGLISH VERSION FOLLOWS THE FRENCH ONE (NO NEED TO USE GOOGLE TRANSLATION)
Ce film est l'adaptation cinématographique du livre et donc du travail de Georges Devereux avec James Picard, un amérindien Black Foot: Psychothérapie d'un indien des plaines. Il s'agit donc d'une histoire vraie et d'un document d'une richesse incroyable parce que grâce à Arnaud Desplechin on peut avoir dans un film de deux heures la vision globale d'une analyse complète.
Je n'ai pas encore lu le livre de Devereux, donc je ne peux pas vous dire si l'adaptation est fidèle, mais vu que le film ne semble rien réduire à des ficelles grossières, a priori ça ne m'étonnerait pas qu'il y soit relativement fidèle.
J'avais très très envie de voir ce film pour au moins 5 raisons, et je n'ai pas du tout été déçue. Mes raisons dans le désordre sont :
Ce qui m'a très vite frappée dans cet opus, c'est le contraste entre le fantasme que j'avais de ce que pouvait être la thérapie d'un amérindien et sa réalité. C'est-à-dire que je m'attendais à voir des psychopathologies nouvelles avec des symptômes originaux et exotiques. Par deux fois déjà on m'avait expliqué que peu importe les ethnies, les pathologies sont les mêmes, même si leurs expressions peuvent être différentes mais il m'a fallu ce film pour finalement intégrer cette notion. D'ailleurs mon a-priori est partagé par les personnages du film : lorsqu'il est établi que les problèmes de Jim Picard ne sont pas d'ordre somatique, la première question que se posent les membres de l'hôpital militaire de Topeka est « avons-nous déjà traité un indien ? » et c'est ainsi qu'ils font appel à Georges Devereux.
La différence en réalité entre la psychanalyse d'un occidental moyen et celle d'un natif américain par exemple Jimmy Picard, m'a semblé que justement dans sa culture il y a déjà des concepts permettant de circonscrire la réalité psychique. Comme par exemple celui de la mère phallique qui est …...... (case à remplir SVP par ceux qui verront le film après avoir lu cette critique (je ne suis pas une bonne critique je ne prends jamais de notes durant les séances de cinéma)).
Ce qui est le plus fascinant chez les grands acteurs et dans les grands films c'est la concentration. La façon dont un mot, par exemple, est prononcé de façon nette, précise et sans ambiguïté. James Picard (Benicio del Toro) a une présence, un impact sur la caméra qui prouve que rien d'autre n'existe que le moment présent.
Ce qui est notifié de façon subtile dans le film, c'est le rapport de l'Amérique à ses natifs. Lorsque Jimmy se rend dans un bar on lui demande sa carte d'identité pour lui servir de l'alcool, comme s'il était mineur. Et il ne peut pas retirer de l'argent à la banque sans la signature d'un « blanc ». Desplechin n'a pas appuyé sur le mépris et le racisme et les a juste cantonné à des faits pour laisser s'exprimer à l'incroyable finesse et intelligence de Jimmy.
Jimmy dit qu'il pourrait parler des rêves toute la journée.
Ce film tisse très finement les relations entre ses deux hommes et l'évolution de la thérapie. La façon dont Devereux donne les outils de base de l'analyse à son patient pour le laisser ensuite quand il les maîtrise, se dépatouiller avec, pour qu'il ne s'agit pas d'une relation de blanc à indien, mais d'homme à homme. L'outil de base est ici l'analyse des rêves. Bientôt le filmage nous fait entrer dans ces songes, si bien que parfois le lien entre ce que le film présente comme réel et le rêve devient incertain. Pas de changement des couleurs ou de flou artistique pour signifier qu'on n'est plus dans la réalité. Techniquement Desplechin reste au plus près de son sujet, c'est-à-dire d'un homme qui parfois ne sait plus où commence et où s'arrêtent les états de veilles et de sommeil.
Je ne vais pas aller dans les détails et analyser une scène, car je pense qu'il vaut mieux vous laisser le découvrir.
Ce film rend merveilleusement bien, et avec une grande générosité, qui pour moi est inédite chez Desplechin, les rapports complexes entre les être humains et leur psyché. J'ai trouvé très belle l'analogie que fait Devereux quand Picard lui demande combien de temps va prendre l'analyse, il lui dit : «combien de temps faut-il pour rassembler des chevaux égarés?» et Jimmy répond quelque chose comme « personne ne peut savoir ».


This film is the adaptation of the book and work of Georges Devereux with James Picard, a black foot native American : Reality and dream: Psychotherapy of a Plains Indian, New York: International Univ. Press, 1951. So it's a true story, and a an amazing document. Now thanks to Arnaud Desplechin we can have in a two hours film an overview of a completed psychoanalysis.
I haven't read Devereux's book yet, so I cannot tell you if the adaptation is faithful, but as this film doesn't seem to reduce or simplify anything I wouldn't be surprised if it was rather faithful to the original work.
I was absolutely impatient to see this opus for at least 5 reasons, and I haven't been disappointed. Here are my reason (not in the order):

  • Arnaud Desplechin is one of my favourite contemporary filmmaker, and Jimmy P. is his second film in English, the first one was a British production called Esther Kahn, that I absolutely adored.
  • I am passionate about psychoanalysis.
  • Mathieu Amalric ( that you probably discovered as the villain in Quantum of Solace).
  • Benicio del Toro, do you really need me to explain the attraction?...
  • The native Americans ( for those who are faithful to this blog, you know that I have covered about three years ago the festival De la plume à l'écran which promotes native American cinema. if you are in France in two weeks I encourage you to come to their next session). I've always been fascinated by Amerindian culture, one of my favourite books ever is Lame deer seeker of vision.
What really stroke me in this opus, is the contrast between the fantasy I had of what would be the therapy of a native American, and what it happened to be. Though I had been told at least twice that neurosis exists everywhere in the world and in all ethnics, I still thought that Jimmy would suffer from exotic symptoms. Needless to say that my prejudice was shared by the characters of the opus. When they ruled out the physical problem the first thing they wondered was : «have we psychologically treated an Indian before? » and this is where they called Georges Devereux, an anthropologist, to do the work.
What is notified in this film, in a very subtle way, is the relationship of America with its natives. When Jimmy wants to purchase alcohol he has to show an ID, like a kid under 21. And he can't withdraw his money from the bank without the signature of a « white ». Desplechin only displayed the facts without over dramatising them. The contrast between the way America treats Jimmy like a kid when he's very much an adult and the way his intelligence appears in his therapy is sufficiently efficient.
Jimmy says that he could speak about dreams all day long.
What is very fascinating in great actors and great films is how focused they are. The way, a word, for example, is outrightly expressed, without any ambiguity. James Picard (Benicio del Toro) is here with such an impact that only the present moment exists.
This opus weaves very delicately a drawing of the relationship between those two men and the evolution of the therapy. The way Devereux gives the basic tools of psychoanalysis to Jimmy and then let him use it by himself, shows that it's a man to man dialogue, not a white to Indian one. This basic tool is the interpretation of dreams. And early in the film, we enter into James' dreams. Sometimes the link between what is presented as real and the dreams is very blurred. There are no changes of colours in the dreaming parts, technically Desplechin stays faithful to Jimmy's symptom which is to be unable to distinguish dreams from reality.
I won't analyse any details of any scene, you must all discover by yourself.
In my opinion this films re-establishes very well and with a great amount of generosity , which is new in Desplechin 's filmography, the complex connections between humans and their psyche. I loved Devereux's analogy when Picard asked him how long it takes to finish a psychoanalysis, he says «how long does it take to gather runaway horses? » and Jimmy answered something like « no one can know ».

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